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Manu & Flo en RDC
16 mars 2009

Les joies de la saison des pluies

On parle souvent – que ce soit fièrement ou honteusement – de notre drache nationale, et bien sachez qu’elle est absolument minable à côté des pluies et orages que le ciel congolais peut déverser.  Déjà, le temps est difficilement prévisible, ici : ça se dégage et se couvre très vite, la couleur du ciel du matin ne vous garantissant rien quant au temps qu’il fera le reste de la journée.  Parfois vous jureriez qu’il va pleuvoir, et finalement ça passe sans la moindre goutte.

            Mais quand ça tombe, alors ça tombe bien.  Ca commence toujours de la même manière : un ciel noir de noir à l’horizon, qui vient toujours du fleuve, le vent qui se lève, et puis tout à coup, sans la moindre gouttelette pour vous avertir, ça drache.  Si vous n’avez pas eu le temps de « fuir » (= vous abriter) et que la pluie vous « attrape » (= vous surprend) – j’aime tout particulièrement ces deux expressions, traductions du lingala – quand vous êtes dehors, il ne faudra pas deux secondes avant que vous ne soyez trempé comme si on venait de vous balancer dans une piscine.

            En cas de pluie, les Congolais partent du principe que tout change : vous pouvez arriver en retard – ou ne pas arriver du tout – à votre rendez-vous, sans même prévenir, la pluie vous excusera d’elle-même.  Et pour cause !  Le trafic devient un véritable capharnaüm : le transport est pasi de chez pasi, des flaques énormes se créent sur les routes (même sur le boulevard du 30 juin, axe principal du centre ville), au point que même des 4x4 puissent y noyer leur moteur (pour les autres voitures, se risquer à traverser la flaque relève du suicide), les embouteillages empirent, les trous des routes se creusent encore plus profond, des arbres tombent et bloquent la route, des voitures embourbées ou au moteur noyé bloquent le passage ou avancent au rythme du pauvre chauffeur qui la pousse tant bien que mal, etc.  Et si vous décidez d’y aller à pied pour avancer plus vite, vous aurez par endroits de l’eau jusqu’aux genoux, en plus de courir le risque de vous faire électrocuter, en raison des fils électriques qui passent un peu partout sans véritable isolation.

            Hé ouais, y’a pas vraiment d’égouts ici, et quand y’en a, c’est sans grille pour couvrir le trou, celui-ci étant assez grand pour qu’une roue de voiture s’y coince, ou pour qu’une personne pas trop grosse y tombe.  Mieux vaut donc repérer ces trous par temps sec, pour savoir les éviter en cas de pluie.  Par endroits des tranchées ont été creusées, mais la terre, le sable et les déchets ont vite fait de les boucher ou de les remplir…

            Et ce n’est pas tout.  Quand vous rentrez chez vous, soulagé de pouvoir vous sécher et vous changer, surprise !  La maison est inondée parce que vous n’étiez pas là pour fermer les fenêtres, et vous ne l’avez pas fait le matin en partant puisque le ciel était tout dégagé.  Deux possibilités.  Soit le vent chasse du côté des chambres et de la salle de bain, auquel cas on les retrouve peintes en dalmatien, le vent et la pluie s’étant chargés de projeter à l’intérieur le mélange de poussière, sable et pollution qui s’accumule sur les grilles-moustiquaires des fenêtres.  Soit ça chasse du côté de la terrasse et de la cuisine, et alors là c’est l’inondation totale de la cuisine et du salon, voire du couloir si on n’intervient pas à temps pour chasser l’eau à la raclette et placer des torchons aux endroits stratégiques, puisque le sol penche et achemine toute l’eau de la terrasse vers l’intérieur de l’appartement. 

            Mais on n’est vraiment pas les plus mal lotis, loin de là !  On est à l’étage et à l’abri de tout risque d’éboulement de terrain.  Parce que dans les quartiers plus éloignés du centre, les dégâts peuvent être bien pires.  Par exemple, chez Mama Gégé à N’jili, un jour l’énorme tas d’immondices du coin de sa rue s’est écroulé, laissant libre passage à un énorme torrent dans la rue et les parcelles avoisinantes.  Le petit studio de Gégé a beau être surélevé de 50 cm, elle avait de l’eau jusqu’aux genoux à l’intérieur.  Et comme le torrent entraînait sur son passage tous les déchets du coin et le contenu des latrines des parcelles alentour, elle a pu jeter tous ses tapis et meubles, se félicitant d’avoir placé ses vêtements tout en haut de l’armoire…

            Et malgré tout ça, les Congolais réagissent d’une manière admirable à ces catastrophes.  Les mamas se marrent en courant – pataugeant – dans l’eau, remontant leurs pagnes tant bien que mal et s’abritant sous leur bassine ; les chauffeurs de taxi non encore noyés ni embourbés chargent leur véhicule au maximum, afin de venir en aide au plus de piétons possible ; les autres s’abritent et attendent patiemment sous une pompe à essence ou devant une boutique, profitant de l’occasion pour commenter la situation et faire connaissance avec leurs compagnons rescapés de la pluie.  Vraiment, pas de raison de se stresser ou de s’énerver d’être en retard, d’être trempé ou d’avoir froid, ni même d’avoir peur, tout le monde se vient mutuellement en aide et prend la chose avec calme et humour.

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